Rencontre avec Sosana Marcelino pour le prochain L.S.S / Studio

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Le deuxième L.S.S / Studio de la saison, c’est déjà la semaine prochaine, avec Sosana Marcelino qui présentera sa pièce Mon histoire de la danse. Sosana a accepté de répondre à nos questions sur son parcours, ses projets mais également la pièce qui vous sera présentée jeudi et vendredi prochain au CCN – Ballet de Lorraine. Bonne lecture !

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Bonjour Sosana, pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Sosana Marcelino et je suis chorégraphe et danseuse. J’ai créé ma compagnie ici en Lorraine en 1997 et depuis, je monte différents projets avec différents artistes : danseurs, musiciens, plasticiens…

Pouvez-vous justement nous parler des différents types de projets que vous menez ?

Mon travail consiste en trois choses différentes. Il y a tout d’abord le travail de création, avec des pièces qui s’adressent au tout public ou spécifiquement au jeune public. Il y a aussi le travail de sensibilisation. Il s’agit alors d’amener la danse à tous les publics, par le biais de stages ou d’ateliers. Quelques fois, il s’agit de travailler aussi avec des publics encore plus différents que les scolaires ou les étudiants, telles que les personnes en difficulté sociale ou empêchées (dans les hôpitaux par exemple). Ces projets amènent souvent des travaux artistiques en corrélation. Enfin, il y a le travail de diffusion qui consiste à vendre les spectacles, mais il faut reconnaître que cela arrive de plus en plus rarement.

Cela vous tient à coeur d’aller vers tous les publics…

Oui, cela m’a toujours tenu à coeur et c’est très important pour moi. J’en parle justement dans le solo que je vais présenter les 17 et 18 mars prochains. J’ai commencé à donner des cours à des enfants alors que j’étais encore jeune. Très tôt, j’ai alors été en relation avec ces questions de transmission et de contact. Aller vers les publics fragilisés, que ce soit social ou physique, me tient aussi à coeur parce que j’ai eu moi même des difficultés pour accéder à la danse, notamment à cause de mon milieu social. Aujourd’hui, je souhaite donc pouvoir offrir cet accès à tous.

Quels ont été vos premiers pas dans la danse ?

J’ai commencé la danse à 11 ans, avec des cours de danse classique et de moderne jazz, de manière hebdomadaire. J’ai ensuite intégré le conservatoire pour travailler la danse classique, puisqu’il le fallait, soit disant. J’ai finalement laissé tomber pour aller vers la danse contemporaine et le travail de création. Mais il y a eu beaucoup d’apprentissages différents avant que je choisisse de me tourner vers la création.

Pouvez-vous présenter la pièce Mon histoire de la danse ?

C’est un solo qui retrace mon parcours. J’avais vraiment besoin de relire un peu le passé pour pouvoir parler du présent. Cette pièce prendra la forme d’un récit chorégraphié, avec de la danse mais aussi avec de la prise de parole. Ce rapport au public et le travail avec la voix sont très importants pour moi. Cela représente un enjeu et un défi que d’aller dans cette direction et d’avoir recours au travail vocal. Même si finalement, je me suis rendue compte que la présence de la voix est là depuis 2000. A la manière de Pina Bausch, c’est aussi important que le danseur puisse s’exprimer avec un outil qui fait partie de son corps, et qui est aussi du geste après tout.

Pouvez-vous nous parler de la scénographie de la pièce ?

En termes de scénographie, je veux vraiment une scène très pure et un travail de lumière, qui restera toutefois assez léger. Je souhaite surtout mettre en valeur le fait que je vais me livrer, me donner et créer une relation privilégiée et sans artifice. En 2005, j’ai fait un solo qui s’appelait SO, et c’était un peu le même principe. J’étais seule en scène avec très peu d’éléments en termes d’accessoires (un tutu, une robe, un châle). Il fallait jouer toute la chose sans apport extérieur. Tout était véhiculé entre le corps dansant, chantant et parlant. Je l’ai beaucoup dansé et tourné et il ne me correspond plus, bien qu’il ait été sur la même note – il parlait aussi du parcours – mais cela restait très symbolique et très poétique. Il évoquait beaucoup l’apport à ma double culture, avec la culture portugaise… C’était beaucoup autour de mes origines… Aujourd’hui, j’ai envie de développer un nouveau solo, avec quelque chose que je peux danser réellement dix ans après, avec mon corps d’aujourd’hui. C’est une espèce de face-à-face avec moi-même, tout en pensant évidemment au public.

Pouvez-vous nous parler de ton processus de création pour cette pièce ?

Le processus de création se fait à partir d’une vidéo d’un ensemble de photos et de vidéos que j’ai sélectionnées. Ces photos triées de manière chronologique représentent mon parcours de la danse et présentent un contraste des différents styles de danse par lesquels je suis passée. C’est pour cela que cela s’appelle aussi Mon histoire de la danse, bien que cela fasse en définitive référence à l’histoire de la danse. Le récit commence avec le rêve de la danse qui s’est révélé être plutôt de la gymnastique au départ pour des raisons de facilité d’inscription dans une école. Je suis ensuite passée à la danse classique, puis au jazz, à la danse africaine, au flamenco, au music-hall, au paso doble. J’ai fait l’expérience de nombreux apprentissages mais j’ai dû à un moment donné, trancher et faire un choix. Le showbiz ne m’intéressait pas… J’ai voulu faire de la création. La sélection s’est faite comme cela… Mais il y a une influence et un style qui opèrent quand j’écris la danse. Les mains et les doigts ont par exemple été travaillés d’une certaine façon, comme le rapport au sol et quelque part, je retraduis cela. Il s’agit somme toute de danse contemporaine, mais beaucoup de choses sont re-véhiculées, à travers cette histoire de tous ces styles restés ancrés et qui ont été très importants dans ma vie.

Vous allez intégrer le CCN – Ballet de Lorraine pour une étape de création, de quelle étape s’agit-il ?

Actuellement dans le processus, j’ai déjà une demi-heure de pièce que je répète chaque jour. Ce sont trente minutesd’écriture. J’écris ce que je vais dire vocalement et les transitions avec les passages de danse. Tout cela est calé sur ces trente premières minutes. Ce qu’il reste pour l’étape de travail ici au CCN – Ballet de Lorraine, c’est la suite. Je prévois pour le moment de poursuivre ce travail d’écriture. En ce moment, je me réapproprie les phrases que je voudrais danser en les revivant physiquement. J’en suis précisément à cet endroit. Il me manque encore la fusion de cette deuxième partie entre l’écriture et la partie danse.

L’écriture a une place très importante dans votre travail ?

Oui, et notamment spécialement pour celui-ci pour lequel j’ai couché sur papier ce que j’avais envie de dire. Mon travail doit jouer sur la liberté. Je mesure et j’équilibre les choses entre ce qui est dit, ce qui doit être gardé, reste mystérieux et ce qui ne se dit pas. Au début, je me suis dit que j’allais parler et puis finalement, je commence à parler et je réalise que je parle trop et qu’il faut que je danse plus. C’est un juste équilibre à trouver entre la danse et l’écriture. C’est assez complexe de déterminer cela, entre les moments décalés, dramatiques, humoristiques, légers ou encore profonds. Ces contrastes permettent de rendre la pièce vivante et transmissible au regard d’un public. Pouvoir mêler danse, voix et écriture est quelque chose d’extraordinaire pour moi. Le champ de l’écriture en tant que tel est réellement ouvert, le champ de l’exploration vocale aussi et la danse est présente quoiqu’il arrive dans mon travail.

Interview réalisée le 26 février 2016