Rencontre avec Carlo Schiavo

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Carlo Schiavo a rejoint le CCN – Ballet de Lorraine, au sein de la Cellule d’Insertion Professionnelle (CIP), en août dernier, tout comme Joséphine Meunier. Nous sommes donc allés à sa rencontre pour recueillir ses premières impressions, connaître son parcours et en savoir davantage sur lui !

Mise en place en 2005, la CIP s’adresse à de jeunes danseuses et danseurs ayant achevé leurs études de danse. Elle leur permet de suivre les classes techniques et de participer aux répétitions, et à certaines créations ou reprises aux côtés des danseurs du ballet. 

Bonjour Carlo, peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Carlo Schiavo. J’ai commencé la danse à l’âge de 6 ans avec ma cousine, à Naples. Au début, je considérais cela comme un jeu. Puis, quand ma famille a déménagé au nord de l’Italie, il a été difficile de trouver une partenaire de danse, il n’y avait plus ma cousine. J’ai alors commencé la danse classique sur les conseils de certains professeurs. Ils m’ont aussi expliqué qu’en faisant de la danse classique, j’aurais plus d’opportunités professionnelles. Ensuite, nous sommes retournés à Naples. Je suis entré à l’école Mara Fusco, qui est une très bonne école privée de danse. Il y avait, dans le jury, la directrice de l’Ecole Supérieure de Danse de Cannes Rosella Hightower. L’année suivante, j’y ai réalisé un stage au mois d’août et un an après, j’ai passé l’audition pour l’intégrer. J’y suis donc entré en 2010 alors que j’allais avoir 16 ans. J’y suis resté de 2010 à 2015, après quoi, j’ai passé l’audition pour entrer au CCN – Ballet de Lorraine. En parallèle, j’ai passé mon baccalauréat en France et j’ai aussi obtenu une licence en Arts du Spectacle.

Quels ont été tes premiers pas dans la danse ?

C’est en voyant dans la rue des gens qui pratiquaient des danses de salon que j’ai eu envie d’en faire. J’ai donc demandé à mes parents et c’est comme cela que j’ai commencé, tout simplement. Dans ma famille, mes grands parents et mon père aiment la danse, mais ce n’est pas professionnel. Mon père fait d’ailleurs du football, alors ce n’est pas vraiment la même chose.

Tu as commencé la danse par loisir, mais à quel moment as-tu eu un déclic et t’es-tu dit que tu voulais être danseur professionnel ?

J’ai en effet commencé pour le loisir, mais cela n’a pas duré longtemps. Je savais déjà que je voulais faire de la danse de manière professionnelle. Lorsque j’ai commencé, je dansais de manière très régulière pour l’âge que j’avais. Quand tu travailles tous les jours de 14h à 20h (à partir de son entrée à l’école privée de danse à Naples), tu sais que ce n’est plus uniquement pour le loisir. Il faut préciser aussi que la scolarité et la danse n’étaient pas dispensées dans le même établissement, ce qui rendait les choses un peu compliqué d’ailleurs.  

Qu’est-ce que la CIP représente pour toi ?

Je pense que c’est un moyen de vivre une première fois la vie en compagnie. Il se peut aussi que nous ayons l’opportunité de danser sur scène, donc c’est vraiment très sympa. C’est aussi un processus d’intégration dans un groupe. Nous avons la possibilité de danser avec la compagnie, d’apprendre le répertoire, de faire les mêmes choses que la compagnie, et en même temps, je trouve très agréable que nous puissions nous entraider et de développer ces échanges. Je suis très content et j’apprécie cela.

Comment s’est passée l’audition pour intégrer la CIP ?

Nous avons fait les auditions à Paris au Conservatoire. Il ne s’agissait pas d’une audition spécifique pour la CIP, mais d’une audition générale pour intégrer la compagnie. Je me suis vu proposer une place pour la cellule d’insertion professionnelle.

Pourquoi avoir choisi de passer les auditions pour le CCN – Ballet de Lorraine ?

C’est une compagnie de répertoire. J’ai regardé le projet et cela m’a donné envie de venir, ou au moins d’essayer.

La CIP dure un an, quels sont tes projets ensuite ?

Oui, je termine le 30 juin. J’aimerais ensuite beaucoup intégrer la compagnie mais ce n’est pas moi qui vais en décider, cela dépendra de plusieurs choses et de plusieurs personnes. Sur du plus long terme, j’aimerais commencer ma carrière et travailler dans une compagnie où je me sente bien. Une fois que tu te sens bien quelque part, ce n’est pas la peine de changer de compagnie une fois par an.

Quel est ton ressenti depuis ton arrivée ici ?

Je suis très bien et je suis heureux ici. J’aime ce que nous faisons. C’est un groupe formidable où j’ai réussi à trouver ma place. Je pensais que le groupe allait être un peu plus fermé puisque les membres auraient très bien pu se dire « il est nouveau, on le laisse tout seul ». Mais non, ils sont toujours ouverts et prêts à accueillir de nouvelles personnes. Je trouve que c’est quelque chose d’assez étonnant et très agréable. J’aime beaucoup travailler avec eux.

Tu connaissais un peu la région avant de venir ?

Non pas du tout, j’avais été prévenu sur le temps qu’il faisait mais de toutes manières, on s’y fait. Je trouve la ville très agréable, même si nous passons 90% de notre temps ici, au CCN – Ballet de Lorraine. C’est une ville de jeunes et je trouve les gens très ouverts.

A quoi ressemble une semaine type pour toi ?

Mes semaines sont variables et mon emploi du temps suit ce que les danseurs de la compagne font. Sur le papier, nous sommes en CIP, mais sur le terrain, nous faisons la même chose. Parfois, quand les pièces sont déjà montées, nous regardons seulement et nous essayons d’apprendre. Mais c’est normal, c’est comme cela partout. C’est très intéressant de faire partie du groupe. Ce qui ne change jamais en revanche, c’est que nous commençons à 10h et que nous terminons à 17h45.

Quels sont selon toi les aspects les plus difficiles dans le métier de danseur ?

Je pense que je n’ai jamais eu problème avec la danse au niveau mental. Les contraintes vont être surtout physiques et cela ne dépend pas de toi. Tu peux travailler mentalement pour enlever la blessure. Mais comme c’est quelque chose qui est présent et que cela ne dépend pas de toi, cela devient une frustration de ne pas pouvoir danser. C’est gênant.

Les blessures sont fréquentes chez un danseur ?

Je pense que oui. Au bout d’un moment, le corps cède un peu. Certaines personnes réagissent bien, d’autres ont plus tendance à être blessées. Personnellement, je ne vais pas dire que je n’ai pas de blessure et je ne veux pas que cela m’arrive. Mais normalement, je n’ai pas énormément de problème. Je n’ai jamais du m’arrêter mais je n’ai que 21 ans. Quand on commence à en avoir 28 ou 29, c’est différent.

Quels sont les aspects les plus bénéfiques quand tu es danseur ?

C’est de se sentir bien dans son corps, de rentrer à la maison et de sentir la fatigue. C’est de la bonne fatigue, parce qu’on a travaillé. Même si cela fait mal, c’est de la bonne douleur. C’est un peu bizarre, c’est du bien-être qui vient avec la douleur.

Quelles sont selon toi les qualités indispensables pour danser ? 

Tout simplement je pense qu’il faut un esprit ouvert et vif. Si quelqu’un montre de la réticence à faire quelque chose, avec un esprit fermé et négatif, cela ne va pas marcher. Et après si tu mets trop de temps pour apprendre quelque chose, cela devient gênant. Enfin, je ne dis pas qu’il faut aller à mille à l’heure. Il faut une certaine rapidité et une adaptation du corps. Il faut passer d’une pièce chorégraphique à l’autre, d’un chorégraphe à l’autre, changer de style, surtout ici parce que nous sommes dans une compagnie de répertoire. C’est quelque chose de corporel. Pour moi, un danseur, il faut qu’il sache tout faire. Ce n’est pas « je fais du contemporain », « je fais du moderne », « je fais du jazz ». Non, un danseur doit savoir danser et s’adapter.

Quels sont tes chorégraphes préférés ?

C’est une très bonne question, parce qu’il y en a beaucoup. Mais s’il fallait faire un choix, je le ferais par époque. Je choisirais Forsythe. J’aime aussi les choses plus modernes, donc je prendrais Emmanuel Gat. Ce sont des noms très connus quand même. Pour le passé, je dirais Graham et Cunningham. Ce sont des noms très forts mais parfois, il y a des chorégraphes, qui sont peu connus et qui viennent « de nulle part », qui n’ont pas rencontré de grands succès, et qui font pourtant de très bonnes choses.

Interview réalisée le 8 octobre 2015